Ils aiment la culture noire mais détestent les noirs
Suite aux récents événements auxquels nous avons été confrontés au cours de ces derniers mois voire de ces dernières années (l’avènement mirobolante du hip-hop ou encore les bavures policières), il est indéniable de notifier que le noir est devenu à la mode depuis quelque temps déjà. Nous pourrions être amené à penser qu'il s'agit là d'une bonne chose, que cette glorification de ce qui touche au noir devrait être bien pris, mais nous allons voir que la question est plus compliquée qu'il n'y parait et peut vite être orientée vers une attention assez perverse.
Que ce soit les nattes collées, les coiffes indiennes, la démonstration du twerk ou encore les styles de musiques relatives à la culture noire que sont le rap, le RnB ou la Soul ; ces composantes grandement développés par les minorités ethniques voient leur influence grandissante cela même au delà de leur berceau initiale. Cependant, si nous pouvons observer une plus grande acceptation de ces cultures à travers le monde à l'aide de la mondialisation et des réseaux sociaux, cette affection particulière pour ce qui est étranger peut vite dériver vers un fétichisme malsain. On parle ici d'appropriation culturelle.
![]() |
https://pravdassas.com/2017/12/19/lappropriation-culturelle-nouvelle-lubie-americaine-bien-pensante-ou-realite-neocolonialiste-2/ |
Le terme d'appropriation culturelle fut popularisé par la réalisatrice canadienne Loretta Todd et l'écrivaine féministe américaine bell hooks. Les deux femmes, alors portées par la pensée post-coloniale, définissent cette notion de la façon suivante : "l’appropriation culturelle, c'est le vol du vestiaire ou des symboles d’une culture “minoritaire”. Si cette définition a le mérite d’être claire, son application dans le réel, elle, reste sujet à débats."
Le sujet reste donc un débat ouvert et méticuleux. Pour l'essayiste Richard Memeteau, l'inspiration dans le processus de création est normal, il tourne néanmoins à l'appropriation culturelle lorsque un profit est réalisé par un groupe au détriment d'un autre. Cela comprends aussi une notion de domination. Par exemple, nous savons tous que la culture blanche euro-centré domine majoritairement de par son influence, qu'elle soit gastronomique, politique, économique ou dans les critères de beauté (qui sera le sujet de l'article suivant). le fait donc qu'une personne caucasienne s'inspire d'une culture dite minoritaire comme par exemple la culture afro sera donc toujours mieux qu'une personne issue de minorités voulant jouir de sa culture.
Le nouvel ordre mondial comme George Bush Senior aime l'appeler nous a vendu un métissage général et larvé profitant aux un comme aux autres sans préciser qu'il ne profiterait au final qu'a un certain groupe, notamment le groupe caucasien européen ou blanc américain. Cette appropriation repose donc sur une domination d'une culture dominante sur une culture majoritaire. Lorsque cette culture dominante daigne donc s’intéresser à la culture minoritaire, cette dernière en voit son essence spolié. Ce qui est considéré ghetto chez les uns devient à la mode et exotique chez les autres.
De plus, on dissocie l'appropriation culturelle de l'assimilation. L'assimilation consiste à abandonner sa culture pour se conformer à une autre, ce qui n'est pas le cas observé avec l'appropriation générale que nous observons en ce moment. Prenons pour exemple la culture noire, elle est devenu à la mode ces dernières années pour son coté cool et exotique. Tout le monde aujourd'hui souhaite être noir ou être rattaché à cette culture via la résurgence du mouvement hip-hop ses dernières années.
"Ce qui est incontestable est que la notion d'appropriation culturelle s'est démocratisée. Au départ, elle naît d'un débat local sur l'attribution des bourses pour les œuvres représentant la culture autochtone au Canada. Mais la notion a pris de l'ampleur très récemment, en 2013, et a modifié le sens de l'appropriation culturelle. Au moment de l'émergence du mouvement Black Lives Matter et de la polémique autour du twerk de Miley Cyrus, les réseaux sociaux ont aussitôt réagi et l'ont fait exploser" déclare Richard Mèmeteau, professeur de philosophie.
Un autre exemple, l'appropriation de la chevelure afro à travers les tresses. Le cas le plus équivoque est la clip de Katy Perry "How we do" en 2014. Katy Perry se grima en noir en prenant un accent assez caricatural et grossier. Pendant des siècles, les tresses ont en effet été un marqueur social, le symbole d'une caste et une manière de se distinguer entre différentes ethnies. Elles sont aujourd'hui constitutives de l'héritage des diasporas panafricaines.
En somme, la culture noire voit sa richesse ainsi que son patrimoine dévoyé de son but premier et tout cela dans l'ignorance la plus totale des personnes qui l'empruntent ou parfois en toute connaissance de cause. Il est donc important de constamment rappeler l'origine des acteurs proéminents de cette culture pour qu'elle ne soit pas complément aseptisé.
Commentaires
Enregistrer un commentaire